Les traitements contre les rides résistent à la crise. Le Botox, produit phare d'Allergan, reste le plus utilisé dans la lutte contre les rides, avec 80% de part de marché en Europe et dans le reste des pays où la marque est présente. Le marché s'élève à plus d'un milliard d'euros, dont 320 millions pour l'Europe. Difficile d'évaluer la place prise par Azzalure, le traitement à base de toxine botulique lancé par Galderma en juin dernier. La filiale commune de Nestlé et L'Oréal assure que les premières ventes «dépassent ses espérances». Son grand concurrent, Allergan, qui commercialise le Botox depuis des années, estime de son côté que Galderma n'a grignoté que «1% à 2% de part de marché» en France. «Nous conservons près de 80% de part de marché en Europe et dans les pays où nous sommes présents, pour les traitements à base de toxine botulique», a expliqué vendredi David Pyott, président d'Allergan, qui participait à Paris au congrès de l'Imcas rassemblant des dermatologues et des chirurgiens plastiques du monde entier. Allergan, l'un des leaders mondiaux de la dermatologie et de l'esthétique médicale, se développe aussi bien dans les soins (ophtalmologie, urologie, etc.) que dans la cosmétique. Dans ce domaine, qui représente 30% de ses ventes, le laboratoire américain attend jusqu'à 500 millions de dollars de chiffre d'affaires annuel avec le Latisse. Ce nouveau produit pour allonger les cils démarre lentement sur le marché américain. Mais «il devrait séduire les femmes de tous âges», pronostique David Pyott. En attendant, le Botox (utilisé en cosmétique et pour des traitements médicaux) reste le produit phare d'Allergan. En 2009, son chiffre d'affaires est proche de 1,28 milliard de dollars, soit près de 30% des revenus totaux du laboratoire américain. Une croissance assurée. Dans la même spécialité, David Pyott mise largement sur Juvéderm et Voluma. Ces gels pour infiltrations à base d'acide hyaluronique lui permettent d'offrir une gamme de soins complète puisqu'ils «traitent le bas du visage quand le Botox répare les dégâts entre les yeux et sur le front». Le créneau est porteur. Le comblement des rides est le traitement préféré des femmes qui cherchent à améliorer leur physique. Les gels à base de toxine cbotulique et d'acide hyaluronique représentent en 2009 un chiffre d'affaires de 1,1 milliard d'euros, dont 320 millions pour l'Europe et 46 millions pour la France. C'est un marché quasiment stable par rapport à 2008 malgré la crise, juge l'Imcas et «qui devrait croître encore de 5% à 10% par an» au cours des prochaines années. Le marché de l'esthétique médicale est difficile à cerner précisément. L'Imcas l'évaluait l'an dernier à 7 milliards de dollars (5,25 milliards d'euros) mais ce regroupement de praticiens a revu ses données cette année et il estime qu'il était plutôt de l'ordre de 4,3 milliards de dollars en 2008. Globalement, l'esthétique médicale aurait subi une baisse d'au moins 15% qui affecte surtout les actes chirurgicaux. «Les patients recherchent de moins en moins de changements drastiques à base de chirurgie. Ils s'intéressent plus aux traitements légers qui leur permettent de garder leur visage intact», explique Benjamin Asher, directeur de l'Imcas. Les prothèses mammaires (500 millions d'euros de chiffre d'affaires dans le monde dont 14 millions en France) ont ainsi reculé de 15% en un an. Moins toutefois que les traitements à base d'énergie. Le chiffre d'affaires des équipements utilisant le laser, la radiofréquence ou les ultrasons plonge de 40%. ** Botox : des risques liés à un mauvais usage. Très rarement, une chute des paupières ou encore des maux de tête peuvent survenir lors d'un traitement esthétique. Les complications restent faibles lors d'une utilisation rigoureuse en médecine esthétique et concernent essentiellement l'utilisation du produit pour des troubles neurologiques. La toxine botulique est utilisée partout dans le monde depuis près de dix ans, dans le cadre de troubles neurologiques particuliers (contractions musculaires anormales), ou dans une optique totalement différente en cosmétologie, pour effacer des rides. Ce traitement commercialisé en France sous deux noms différents (Botox en neurologie, Vistabel, notamment en esthétique) est-il dangereux ? La question est d'autant plus légitime que la molécule de base est une toxine dangereuse, produite par une bactérie, à l'origine de terribles épidémies dans le passé. Malgré quelques alertes, les risques restaient assez flous pour le grand public et, en tout cas, n'avaient pas été rendus publics de manière systématique, malgré un intérêt évident pour cette question. C'est pourquoi, la publication, dimanche dernier, dans la revue allemande Focus d'un bilan méconnu des effets secondaires du Botox effectué par l'Agence européenne du médicament, représente une information intéressante. Ainsi l'Agence européenne a recensé depuis la première mise sur le marché de la toxine, en 1994 et jusqu'en 2007, plus de 600 personnes ayant présenté des effets négatifs sérieux après une injection et 28 décès. En Allemagne, il y aurait eu près de 210 cas depuis 1994, dont 5 mortels, selon Focus. «En réalité, ces données de complications sont des chiffres globaux qui mélangent les prescriptions à visée purement médicale et celles dont l'objectif est seulement esthétique, commente le docteur Anne Castot (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, Afssaps). Cette enquête sur la toxine botulique avait été demandée à l'Agence européenne du médicament après l'observation de plusieurs cas de mésusage. «Ce travail a d'ailleurs montré que certains facteurs de risque favorisent les accidents, comme la susceptibilité individuelle, la dose trop élevée, la mauvaise utilisation, une faiblesse musculaire ou encore des troubles préexistants de la déglutition, poursuit Anne Castot. La toxine botulique agit en paralysant les nerfs, par inhibition d'un neurotransmetteur, l'acétylcholine, chargé de la transmission de l'influx nerveux. Cette propriété est intéressante pour les personnes souffrant par exemple d'un torticolis spasmodique ou de blépharospasme (un spasme des paupières pouvant altérer la vision). En cosmétique, en France, seuls les chirurgiens, les dermatologues et les ORL peuvent utiliser ce produit. Il n'est autorisé officiellement que pour réduire la ride du lion (entre les deux sourcils), mais est injecté aussi dans celles du front ou des commissures des lèvres. Réglementation stricte. Quels sont les risques en utilisation cosmétique ? «Le Vistabel est utilisé à des posologies beaucoup plus faibles qu'en neurologie, avec un risque de complication moindre, notamment en France, du fait d'une réglementation très stricte, précise le docteur Castot. À la suite d'une alerte aux États-Unis, nous avons renforcé les mises en garde par une lettre à l'ensemble des professionnels de santé en 2007.» Néanmoins, quelques complications peuvent survenir, comme une paralysie inattendue à distance du site d'injection ou une chute des paupières, en cas de surdosage. Ont également été décrits des maux de tête ou des réactions individuelles plus graves. «En respectant rigoureusement les règles d'utilisation, il est exceptionnel d'avoir des problèmes, précise le docteur Vladimir Mitz (chirurgien plasticien et réparateur, Paris). Il n'y a pas d'alerte spéciale avec ce produit quand il est bien manipulé, assure aussi le professeur Jean-louis Montastruc (directeur du centre de pharmaco-vigilance de Toulouse). En février 2008, la Food and Drug Administration (FDA), l'autorité américaine de surveillance du médicament, a pour sa part averti à nouveau que l'usage du Botox pouvait avoir des effets dangereux, voire mortels, en cas de surdosage. Mais aucune victime américaine n'avait reçu du Botox à des fins cosmétiques, avait souligné alors la FDA. ** La guerre du Botox est déclarée. Des concurrents du laboratoire américain ont développé leur propre molécule antirides. Le front lisse de l'actrice Nicole Kidman fait des émules. Les rides n'ont plus la cote depuis l'apparition du Botox aux États-Unis il y a moins de vingt ans, et en France en 2003. L'an dernier, le recours aux injections de toxine botulique distribuées par Allergan a progressé de près de 85 % en Europe pour atteindre un chiffre d'affaires de 239 millions de dollars (174 millions d'euros). Ce qui représente à peine 5 % à 10 % du marché potentiel de ces injections réclamées par des femmes de plus en plus jeunes. Autant dire que les laboratoires sont impatients de concurrencer Allergan, qui tire du Botox un tiers de son chiffre d'affaires. L'allemand Merz Pharmaceuticals s'y prépare, le suisse Galderma aussi. Leader sur le marché très proche de la dermatologie, Galderma, filiale de Nestlé et de L'Oréal, espère obtenir d'ici à la fin du trimestre une autorisation de distribution en Europe d'un produit similaire au Botox, l'Azzalure, développé avec le laboratoire français Ipsen. Galderma prévoit une hausse de son chiffre d'affaires (854 millions d'euros en 2008) supérieure à 10 % avec Azzalure. Il est d'autant plus confiant dans le succès de son nouveau produit qu'il en élargit les applications. « Nous avons mis au point une méthode d'injection simple », explique Janusz Czernielewski, vice-président de Galderma. Cela permettra « d'augmenter le nombre de praticiens en ajoutant aux dermatologues un cercle plus vaste de médecins généralistes », souligne Alain Gilbert, associé du cabinet Bionest. La concurrence sur le Botox (dénommé Vistabel en usage esthétique dans l'Hexagone) n'affole pas Allergan. Le laboratoire américain vient de faire homologuer Latisse, un produit destiné à allonger et épaissir les cils. Il a surtout bien d'autres trésors en réserve avec Botox. Contre la migraine. Lancé pour lutter contre le strabisme puis employé contre le spasme hemifacial et la déformation en équin du pied chez l'enfant, Botox a été appliqué au domaine esthétique dans un second temps au vu des résultats esthétiques inattendus obtenus chez les patients soignés pour des désordres médicaux. Il sera relancé à nouveau pour soigner la. migraine chronique et l'incontinence urinaire. Allergan soumettra cette année ses études sur l'antimigraine aux autorités américaines. En vitesse de croisière, les analystes les plus optimistes en attendent des revenus de l'ordre du milliard de dollars, soit plus de 25 % du chiffre d'affaires 2008. Comme l'antiride, Botox Migraine aura une durée de vie de trois à six mois. Un atout loin d'être négligeable rapporté au coût d'une injection (300 à 400 euros en usage esthétique). source: LeFigaro.fr